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Trois ans, ‘stie!

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Trois ans. Cela fera exactement trois ans, le 16 mai 2007, qu’Isa et moi aurons posé nos valises à Montréal. Cet anniversaire est l’occasion pour moi de revenir sur ces trois dernières années, de faire le point, le bilan. Quelle tâche fastidieuse que celle de faire un bilan de vie, faire le point sur ces trois dernières années qui ont changé ma vie, nos vies. Je vous propose donc un voyage accéléré dans les trois dernières années de ma vie : commençons à l’heure où l’immigration au Québec n’était qu’au stade d’idée, de concept caressé doucement, de folie… jusqu’à aujourd’hui. Et sans aucun doute, demain.

Nous voici donc projeté 3 ans exactement en arrière, dans l’avion qui nous conduit à Montréal en ce 16 mai 2004. Les épreuves et les moments intenses que nous venons de vivre resteront à jamais gravés dans nos mémoires. Nos deux dernières semaines en France avaient été fantastiques. Les moments forts avec la famille, avec les amis, les adieux, la veille et le mariage d’un couple d’amis auquel je n’ai pas pu assister en entier, l’au-revoir baclé et raté à mon meilleur ami, la dernière nuit avant le départ où personne ne s’est reposé, le jour du départ les yeux mi-clos et boursouflés… tout cela n’est pas près de s’effacer. Beaucoup enviaient notre projet qui se concrétisait, pendant que les autres se demandaient encore comment on pouvait sciemment lâcher un CDI à notre âge, et partir vers l’inconnu sans même avoir la certitude de retrouver du travail "la-bas". Après presque un an de démarches abracadabrantes, d’aller-retours incessants à l’ambassade du Canada, et de questions existentielles à n’en plus finir, nous y étions. Le point de non-retour était franchi. Alea Jacta Est.

Nos premiers mois sur le sol québécois furent mémorables. Le moindre écureuil fascine, l’accent québécois étonne tandis que le notre nous trahit, la taille exubérante des appareils éléctroménagers et des voitures nous prend de court, l’hiver approchant nous terrifie, l’actualité canadienne et québécoise nous dépasse tandis que les nouvelles de France et "Patxi" en couverture de Paris-Match (la Star’Ac 3… ou 4?) nous rassurent. Nous apprenons à connaître Montréal, un peu plus chaque jour : chacun y découvre ses coins favoris, ses quartiers préférés, ses nombreux parcs. Nous découvrons Montréal et ses festivals d’été, ses feux d’artifice chaque semaine. Après un séjour chez mon parrain qui nous avait accueilli pendant nos 6 premières semaines, nous emménageons en juillet 2004 dans un petit trois et demi d’une tour à logements sur Rachel, avec vue sur le parc Lafontaine et le centre-ville. Nous avions hâte d’y être… le séjour chez mon parrain s’était plutôt mal terminé pour des raisons d’incompatibilité de caractères que je regrette mais sur lesquelles je me m’épancherai pas.

Puis vient rapidement le temps de se trouver du travail, au beau milieu de cette période de découverte de notre nouvel univers. Le stress se fait sentir… et si je ne trouvais jamais? Et si je ne trouvais pas un travail qui corresponde à mes compétences, et qui me plaise ? Allez, on se lance. Six semaines dans un club de recherche d’emploi. Payées. Oui, payées ! Oh, pas de quoi se payer un trois et demi sur le Plateau, bien entendu, mais ça aide quand-même. CV refait mode québécoise, je le dépose sur Monster.ca. Et hop, mes deux prochaines années étaient bookées quelques jours plus tard. Chanceux… oui je sais. Quoique j’ai un souvenir relativement amer de ces premiers mois passés à travailler au Québec pour des casinos en ligne. J’étais tombé sur une compagnie qui ignorait parfaitement ce que signifiait le mot "organisation", et au coeur d’un business délirant d’activités et de rebondissements. Je me suis fait littéralement exploiter pendant mes trois premiers mois, à me demander quelle connerie j’avais bien pu faire en prenant ce maudit avion. Heureusement, les choses se sont améliorées graduellement, et mes journées de travail se sont terminées régulièrement à 17 heures quelques mois plus tard. Ah… maudites habitudes, satanée mentalité française et belle jeunesse, toutes trois m’avaient enferré dans cette compagnie alors qu’il me suffisait de profiter de la flexibilité du marché de l’emploi pour mieux rebondir ! Bah, à l’époque, c’était inconcevable. D’autant plus qu’Isa étudait à HEC et que nous ne vivions que sur un seul salaire, qu’il ne s’agissait en aucun cas de laisser filer. En tous cas !

Le temps passe. Déjà un an… Notre premier retour touristique en France recharge nos batteries tout en les épuisant en même temps : une semaine pour voir tout le monde, c’est bien trop court. Quelques mois plus tard, une partie de la famille vient à nous pour notre plus grand plaisir. Octobre 2005, nous craquons pour un petit chat et lui faisons élire domicile chez nous. Muffin fait désormais partie de la famille. Nous surmontons haut la main notre premier hiver, j’en redemande même. Quelle joie, chaque matin, de marcher sur les trottoirs enneigés de ce premier hiver ! Quelle expérience inoubliable que celle de fumer une cigarette par -42° Celsius avec facteur vent ! Et quelle surprise de constater qu’un deuxième automne nous attend après l’hiver, quand la neige fondante d’avril dévoile les feuilles de novembre emprisonnées sous la glace depuis des mois… La période des découvertes touche à sa fin mais nous réserve manifestement encore quelques surprises.

Nous restons un an dans notre trois et demi sur Rachel, opuis nous déménageons l’année suivante, pour nous retrouver dans un demi sous-sol quelque peu glauque, derrière le Dairy-Queen de la rue Parc. Je ne recommande à personne le demi sous-sol… je pense bien qu’il doit en exister des sympas et agréables à vivre, mais le notre ne l’était guère. Je suis encore dans mes casinos, Isa a trouvé du travail au moment ou sa deuxième année d’étude commence. À part l’obscurité de notre appart qui nous plombe le moral, tout va pour le mieux en cette année 2005. Nous partons quelques jours découvrir New-York, nous achetons notre première voiture, et nous vivons de l’extérieur les émeutes qui secouent les banlieues françaises. Je me laisse emporter par un documentaire saisissant, qui me plonge dans les méandres de l’actualité canado-québécoise et me permet d’y voir beaucoup plus clair : le documentaire "Point de Rupture", sur le référendum de 1995. Ça y est, une fibre de plus vibre en moi.

2005, c’est aussi l’année de la première saison des Invincibles, qui me montre l’audace et la force de caractère des séries TV québécoises qui sont d’une qualité époustouflante. Son cinéma non plus n’a rien à envier au cinéma français. Des films d’une immense qualité comme l’Audition, précédé d’Horloge biologique et suivi de La vie avec mon père, (pour ne citer qu’eux, sortis en 2005) me transportent au coeur des problématiques de la société québécoise que je comprends de mieux en mieux. Je fais des liens, des connexions. Certains référents culturels qui me manquaient viennent peu à peu s’ajouter au puzzle complexe et parfois tordu de la société québécoise que j’apprends à aimer et que j’aime comprendre.

L’année 2005 s’achève sur une note "blanche" : le 16 décembre 2005, 42 centimètres de neige tombent en moins de douze heures sur Montréal et sa grande région métropolitaine. Même pas la peine d’essayer la voiture, elle restera au garage ce jour là. Puis arrivent Noël et nouvel an, entre amis

2006. Élections fédérales, les conservateurs au pouvoir. Puis, les manifestations monstres anti-CPE en France, qui après les émeutes, sont le deuxième évènement que nous avons vécu de l’extérieur, avec nos yeux d’immigrants. Incompréhension face à tous ces jeunes qui n’ont jamais travaillé ou si peu, et qui claquent la porte à un contrat qui aurait pu apporter un peu de souplesse des deux côtés du bureau, le jour de l’entretien, ou le jour de la démission. Passons, et revenons au Québec. Ce Québec que je commençais à comprendre l’année précédente, j’y décrivais une autre de ses facettes qui m’avait sauté à la face dans une chronique intitulée Les deux solitudes. Ces deux mondes différents qui se cotoient cordialement chaque jour, je le vivais quotidiennement chaque jour. À l’époque, je travaillais dans le quartier d’Atwater, à quelques mètres de Westmount… et j’avais coutume de dire que je faisais en réalité des milliers de kilomètres chaque jour pour aller au bureau et rentrer à la maison. Je vivais au Québec, mais tous les matins, j’aller travailler au Canada, et tous les soirs, je rentrais chez moi au Québec. Que personne ne me dise que le Québec n’est pas différent du reste du Canada. Souverainiste de la première heure ou fédéraliste convaincu, il me semble inconcevable (ou hypocrite) de nier le caractère distinctif du Québec.

Le temps passe. Déjà deux ans. Le 16 mai 2006, soit deux ans jour pour jour après notre arrivée à Montréal, nous étions dans le bureau du notaire pour signer les papiers d’achat de notre futur condo. Rien que deux ans ! Puis un deuxième retour en France, plus long celui-là parce qu’une semaine, c’est bien trop court. La folie de la coupe du monde de football envahit Montréal, la France en finale, les Français de Montréal en liesse, mais Zizou qui déconne. Too bad. Montréal se remet d’un mois très spécial, l’ambiance retombe, les confettis disparaissent. Ma grand-mère maternelle décide d’en faire autant, un jour du mois d’août 2006. Le soir même, j’avais mon billet d’avion, et quelques jours plus tard, j’étais en France auprès de ma famille. Décalage horaire, décalage psychologique, tristesse, joie, émotions en tout genre, j’étais là, mais j’étais aussi ailleurs par moments. C’était une épreuve difficile à traverser pour l’immigrant que j’étais et que je reste encore aujourd’hui. On a beau s’y attendre, et on a beau savoir qu’on aura peut-être à faire face à cette éventualité au moment des préparatifs, rien ne peut nous permettre d’être prêt ce jour là. Vivre le décès d’un proche à distance a tendance à prolonger le deuil parait-il. C’était vrai.

Septembre 2006. Un mois de fin d’été qui aurait pu être tout à fait paisible sans le 13 septembre 2006. De ma fenêtre au bureau, du haut de ma tour, j’assiste avec mes collègues aux premières minutes de la fusillade du Cégep de Dawson, pour me retrouver projeté au coeur de l’action à cause d’une stupide mais néanmoins irrépréssible envie de fumer une cigarette. Les deux semaines qui s’en suivirent furent terriblement marqués par l’évènement, et en particulier à la place Alexis Nihon, ou je travaillais. A propos de travail, je commençais à me trouver autre chose en passant des entrevues discrètement en pleine journée ou sur l’heure du lunch, ni vu ni connu. Les casinos me lassaient sérieusement. Je finis par trouver rapidement, pour commencer une nouvelle job le 13 novembre. Commencer un 13 n’était sans doute pas une bonne idée : deux mois plus tard j’étais viré, à mon grand soulagement d’ailleurs, et une semaine après notre troisième retour en France pour les fêtes. Quelle joie de passer ces moments en famille et entre amis !

2007. Je commence ma troisième nouvelle job au Québec.. J’y suis encore aujourd’hui et pour encore longtemps j’espère ! 2007 et son hiver tardif du 15 janvier, qui s’est imposé jusqu’au 16 avril dernier avec un bon petit 10 centimètres de neige fondante pour bien t’écoeurer une dernière fois. Ça a marché pour moi. Cette année, l’hiver a eu raison de moi, et je l’ai même haï. Avril et mai nous passionnent pour l’actualité française et les élections présidentielles, nous nous remettons à regarder le JT de France chaque soir. Le 16 mai 2007, le nouveau président de la république française va prendre ses fonctions, le jour où, il y a trois ans exactement, nous avions posé nos valises au Québec.

A venir, la demande de citoyenneté canadienne ! Pas pour tout de suite, mais on y songe. Il s’en passe des choses en trois ans !!!

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Écrit par
Tof

Qui suis-je? Moi c’est Christophe, je suis originaire du Nord de la France où j’ai passé mes 24 premières années avant de poser mes valises à Montréal le 16 Mai 2004. J’ai travaillé en tant qu’informaticien et webmaster pour plusieurs entreprises de Montréal. Pourquoi avoir choisi d’immigrer? Parce que. Besoin de changer d’air, d’ouvrir mes horizons, de voir comment ça se passe ailleurs dans le monde et ce que ça peut m’apporter personnellement. Pourquoi le Québec ? Parce que parce que c’est l’Amérique en français (et non l’Amérique à la Française), parce que c’est vrai que c’est plus « facile » entre guillemets, parce que je voulais savoir ce que ça faisait -30 degrés sous zéro, parce que je pensais que tout le monde parlait français et quelques-uns anglais, parce que (à suivre – liste non-exhaustive)

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