Et le Boxing day? - Immigrer.com
samedi , 2 novembre 2024
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Et le Boxing day?

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La première fois que j’ai entendu parler de Boxing day, c’était il y a cinq ans. On m’a expliqué qu’il s’agissait d’une tradition nord-américaine de magasinage, le lendemain de Noёl. Ça n’existe pas en Afrique (ailleurs je ne sais pas). Tout comme Halloween ou Thanksgiving. Ce qu’on ne m’a pas dit, par contre, c’est le cauchemar qui vient avec.

Quand j’habitais à Montréal, il m’est arrivé de courir le Boxing Day. Je me souviens d’avoir eu un rabais de 60% sur une belle batterie de cuisine, un autre de 50% sur une console de jeu Nintendo. Quelques bébelles électroniques aussi, ici et là. De toute façon je n’avais pas trop de sous à dépenser. Les magasins bondés? Pas de problème! Je m’y connais assez bien en bousculades. Le métro de Montréal procure une bonne pratique de la chose. Puis, mes 90 kgs et mon regard assassin quand il le faut suffisent généralement à me frayer un passage quand j’en ai besoin. Embouteillages et manque de stationnement? Rien à cirer : je n’avais pas d’auto …. Malgré moi, mes enfants ont enregistré le boxing day comme une journée de cadeaux choisis …. contrairement à Noel, qui est en quelque sorte une journée de cadeaux imposés. Et de toute façon, nous ne fêtons plus Noel comme avant (traduire : en Afrique), depuis que nous nous sommes rendu compte que le monstre capitaliste a récupéré cette journée de réjouissances familiales pour la mettre au service du profit. Et comme nos membres de familles se trouvent à 10 000 km d’ici, nous profitons de Boxing Day pour leur acheter des bébelles aussi inutiles que difficiles à expédier là-bas….

Notre boxing day d’aujourd’hui donc. La journée commence par une séance de discussion serrée. Qu’est-ce qu’on achète? Nous avons déjà eu cette discussion au moins dix fois depuis octobre. Évaluation des besoins et tout le toutim. La consigne est claire depuis le début : deux choses par enfant, rien pour les parents. Nous emménageons dans notre maison d’ici six mois, ce n’est pas le moment de faire des folies, une montagne de dépenses nous attendent. Et ce matin, qu’est-ce qui ravive les discussions maintes fois reprises? Parce que monsieur (14 ans) et madame (10 ans) ont changé d’avis. Ils veulent absolument avoir les mêmes bébelles que leurs amis ont eu pour Noel (on devrait interdire aux jeunes de cet âge le téléphone, vous ne trouvez pas?).

Bref, ça discute ferme à matin. Qui veut quoi et ça coûte combien? Ça épluche fébrilement les circulaires. Ça regarde sur les sites des magasins. Maman tente un raisonnement sur la consommation responsable. Et les jeunes disent qu’un iPod, ce n’est quand même pas si cher quand les autres peuvent aller à Cuba ou faire du ski. Papa dit que les autres, c’est les autres. Petit monsieur rétorque que cela, ce n’est pas un argument puisque nous, c’est aussi nous, et que le Boxing Day, c’est juste une fois l’année, pas dix fois. Pôpa rétorque qu’à son âge …. ce qui déclenche un fou rire généralisé et des regards en coin qui signifient : ç’a pas rapport! Le paternel se retire complètement de ce dossier qu’il trouve niaiseux au boutte et s’en retourne se coucher. C’est toujours mieux de couver son vin et de digérer tranquillement sa dinde plutôt que d’entendre des niaiseries d’ado. Maman n’a qu’à se démerder avec ça …. On finit par tomber d’accord : 200$ max de dépenses, à eux de voir….

Nous voilà donc partis, seuls. Faut dire que quand le paternel abandonne, il le fait dans les règles de l’art. Tiens! J’aurais dû prendre sa Visa à lui, histoire de lui faire payer, à ce lâcheur! Nous prenons la route pour aller aux Galeries de la Capitale, le centre d’achat le plus proche. Le problème, c’est que tout le nord de la ville de Québec semble avoir eu la même idée que nous. Tous les habitants de Loretteville, de Neufchâtel, de Wendake, de Saint-Emile et cie semblent s’être donné rendez-vous sur le boulevard Robert-Bourassa. Impossible d’avancer. Je dois mettre en œuvre tous mes talents de resquilleur pour me frayer un passage jusqu’aux Galeries, accompagnée par un beau concert de klaxons. Laissez-moi tranquille, OK! Après tout, moi je supporte votre incivilité sur la route toute l’année, alors je récupère! Fichez-moi donc la paix!

Une fois arrivés, il nous faut trouver une place de stationnement. Holly shit! Où se mettre? Une quinzaine de minutes à tournoyer sans rien trouver, je trouve une personne qui a eu la bonne idée de se ranger en plein dans les lignes jaunes. Si elle a ignoré ce que signifient ces lignes, je peux donc en faire autant : je me range à côté de lui et je m’en vais. Je fais confiance à la police pour reconnaître un bordel quand ils en voient un….

La première bébelle voulue par mon fils se trouve à Future shop. Une sorte de MP3 (ou MP4?) qui ressemble à un iPod (ou vice versa, chais pus, moé!). Ils ouvrent à 13h00 top. Nous sommes là à 13h15 et il y a une foule monstre dedans et une queue d’un km dehors. Mon fils est partant pour la queue mais pour maman c’est NO WAY! Je veux bien faire plaisir aux rejetons mais pas à ce prix. S’il veut, il n’a qu’à faire la queue tout seul, il payera avec sa carte de guichet et je le rembourserai. Il ne veut pas rester tout seul. OK! Comme il a pris soin de prendre les circulaires, nous voilà partis vers La Source. La bébelle est épuisée. Quoi? Dans 25 minutes? Oui Madame! J’ai envie de leur dire : « Allez donc ch…. ». Sauf que le pauvre commis n’y est pour rien. Ils mettent 2 ou 3 articles figurant dans la circulaire et nous font courir comme des imbéciles. Eh, oui! Ils mettent l’article le moins cher dans la circulaire et n’ignorent pas que si on ne le trouve pas, on achètera celui qui est là en abondance et qui coûte jusqu’à deux ou trois fois le prix de la circulaire. Fiston trouve qu’on devrait acheter celui qui est là. Maman, qui a étudié la psycho dans un autre temps refuse. Elle fait remarquer à Fiston que ce produit, absent des magasins, est tout de même disponible sur internet. Comment peut-il expliquer cela? Maman en profite pour donner à Fiston un cours sur les relations entre le marketing et la psychologie des foules. Finalement, Fiston se rend compte que les marchands nous prennent, nous autres consommateurs, comme des poules pas de tête qu’ils peuvent faire courir comme ils veulent. L’affaire est entendue : finies les démarches pour la bébelle, on commandera sur internet. Ouf! Au tour de la fille de nous faire courir….

Madame veut une montre qu’elle a vue chez Ardène, SVP! Seigneur! Ardène! Pourquoi pas Dollarama, tant qu’on y est? Non, c’est Ardène ou rien. Quand elle l’a vue, elle coûtait 5$. Sauf qu’aujourd’hui, elle coûtait 15$ pour deux montres. Et pas moyen d’en acheter une pour 7,50$, non! La petite madame n’en veut plus finalement, de montre : elle préfère des camisoles tendances. Ok! Elle en choisit. Une queue de 15 minutes, juste pour payer! Ouille!

Fiston veut des jeux chez EB Games. Oubliez-ça, chers amis. La queue est longue comme ça. Toute la gent masculine de Québec s’est donné rendez-vous là, ainsi qu’une bonne partie représentant la gent féminine. Faut-tu être fou pour perdre son temps en courant derrière un ostie de jeu vidéo? Fiston me fait remarquer que nous autres, les madames, nous en perdons aussi, du temps, dans les salons de coiffure. Il a raison, bien entendu, mais je ne fléchis pas pour autant. Moi, faire la queue chez EB Games? No way!

À un certain moment je suis tannée. Hyper méga full tannée, comme dirait mon fils. Les pieds me font mal. Je prends donc un banc et je laisse courir les rejetons, qui ont fini par rencontrer une autre maman amie affublée de ses trois rejetons (la pauvre!) Je les laisse donc slalomer tout seuls dans ce centre d’achat transformé pour la journée en foire aux empoignes. J’en profite pour réfléchir un peu, dans la mesure où je peux le faire au milieu d’un va et vient incessant. Mais qu’est-ce qui nous prend tous? À nous voir, on dirait une gang de réfugiés affamés partie à l’assaut d’un camion de vivres du HCR. Croyez-moi, je ne me moque pas d’eux, j’ai déjà été dans un camp de réfugiés. Je me demande juste ce qui nous prend, à courir comme ça derrière des biens de consommation alors que nous avons tout ou presque. Je culpabilise un moment. La petite fille en moi née en Afrique me dit que j’exagère et que finalement, c’est elle qui va écoper. Puis je me dis : « Oh! Puis, merde! Qu’y a-t-il de si mal à se gâter? Pour une fois que je peux me le permettre! Si je ne le fais pas, d’autres le feront. Et je fais tourner le monstre économique. Ma Mastercard est épuisée? M’en fous! La suspension arrière de ma minoune fait cranck! cranck! M’en fouuuuus! Je verrais ça, la semaine prochaine! En attendant, on se calme, OK? »

Finalement, nous n’avons pas trouvé ce que nous voulions (on commandera sur internet). Mais nous avons dépassé nos prévisions budgétaires initiales pour acheter dans une demi-douzaine de magasins ce que nous y avons trouvé. C’est-à-dire un tas de choses inutiles. Facture : 400$. Papa va faire de gros yeux, puis après? Nous avons acheté des vêtements, des souliers, un rasoir pour Fiston (paraît qu’il en faut pour raser le duvet au dessus des lèvres!) Mes deux enfants ont déjà plus de vêtement que les enfants de tout un village africain réunis. Je ne le leur fais pas remarquer. Ils me répondraient, et avec raison que, justement, ils ne sont pas en Afrique. Écoutez : je ne veux culpabiliser personne. Loin de moi l’idée de jouer le grincheux qui voulait gâcher le Boxing Day. La consommation responsable? On repassera, surtout pour mes enfants, qui évoluent avec des enfants-rois. Je les gâte tant que je les ai encore sous mon toit (ce ne sera pas toujours le cas). Mais aujourd’hui, j’ai pris une résolution : on ne m’y reprendra plus, à cette mascarade du Boxing day …. Et vous?

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