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Vacances en France. Que fait…

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Vacances en France.

Que fait tout bon immigrant dont la gentille mamie fête ses 80 ans au mois de juillet ? Je vous le donne dans le mille : il en profite pour passer ses deux semaines de congés annuels en France.
Mais comment part-on en vacances dans le pays qui nous a vus grandir ?
Le dilemne est hilarant, pathétique aussi et terriblement stressant.
Je suis déchirée entre la joie de revoir ceux que j’aime et qui me manquent et l’apréhension de remettre les pieds dans un pays que j’ai volontairement quitté et dont la situation économique et sociale mériterait la Une de la rubrique Yahoo Insolite.

Plus le départ approche et moins j’ai envie d’y aller ; et, en même temps, je voudrais déjà y être. Je sais que ça va passer trop vite et que je ne pourrai pas voir tout le monde, par moment je me dis qu’il vaudrait peut être mieux que je n’y aille pas du tout. Je réalise que j’ai tout simplement peur de ce que je vais trouver.
Tout les français parlent de leur premier retour comme d’un choc, l’incivisme et l’odeur permanente de cigarette étant les plus souvent nommés.

Puis finalement, le 6 juillet je suis dans l’avion. On décolle et je regarde petit à petit les routes et les maisons rétrécir, tout est si bien rangé vu d’en haut. Je m’étonne du nombre de piscines et j’ai à peine le temps de le faire remarquer à Sylvain qu’on est déjà en train de traverser la couche de nuages.

Les 8 heures de vol passent rapidement et c’est déjà l’annonce de l’atterrissage. Je regarde par le hublot et j’ai comme un pincement au coeur. Bon sang ! Mais on n’est pas à Paris du tout là, c’est la campagne !
Pendant un court instant, j’ai même pensé que l’avion avait été détourné et qu’on allait atterrir à Beauvais au lieu de Charles de Gaulle.
Mais non, l’avion se pose, il fait gris et un peu trop froid pour un mois de juillet : welcome to Paris.

Pas de déception à l’arrivée. On sort de l’avion et on suit sagement la personne qui nous précède pour arriver dans un hall où un employé d’aéroport de Paris appelle les passagers ayant une mouche de correspondance.
Pardon ? Connecting fly, zis wouai plizz.
Il nous fait signe, après une bonne dizaine de minute d’attente dans une file sans fin, ou presque, puisqu’elle finit quelques mètres plus loin devant les 2 uniques postes de douane ouverts pour l’occasion.
Mieux vaut tard que jamais, l’employé nous montre qu’il y a une autre file quelques mètres plus loin, cachée derrière un pilier. Vide bien sûr !

On récupère les bagages rapidement, puis on sort et j’aperçois ma mère, la larme à l’oeil et mon papa, un peu ému mais bien trop fier pour le montrer, qui nous attendaient.
On se dirige vers le parking, dans un ascenseur ridiculement petit, on regarde le coffre de la voiture en se disant que, non non non, les bagages ne vont jamais rentrer. Puis finalement si, tout y est. On part.

Premier sentiment qui ne me quittera pas de mon séjour : On est à l’étroit ici.
Tout est petit. Les parkings, les voitures, les routes, les appartements, les lits, les baignoires ….

J’ai l’impression d’étouffer et je ne suis pas la seule apparemment. Mes parents sont déjà en train de s’énerver car ils ne trouvent pas la sortie. Sûrement à cause des panneaux trop petits.

Finalement on arrive et je retrouve la maison de mon enfance, ma chambre comme si je ne l’avais jamais quittée.

La nourriture, ah, la nourriture. Je finis par comprendre Proust et sa madeleine. Tout est bon, exquis, raffiné et je me dis qu’on ne peut vraiment pas renier ses origines. C’est un vrai plaisir d’être tous réunis autour d’un bon repas.

Je suis un peu déçue par Paris, vidée de ses parisiens, ce qui fait que je me retrouve sans sujet d’étude. Les quelques spécimens présents sont toutefois comme dans mon souvenir : speed, malpolis et ne daignant toujours pas ramasser les déjections de leur compagnon à quatre pattes. Mais par contre, j’adore leur bon goût, leur style vestimentaire recherché et les magasins qui vont avec. Je réalise que malgré tout, il y a des choses qui manquent.

Je me rends vite compte également que, même si géographiquement la plupart des gens savent situer le Canada, certains clichés ont la vie dure.
Alors Tabernacle, tu es rentrée en France !
Heu, oui, mais je ne vis pas au Québec, je suis à Toronto.
Ah et c’est où ça ?
C’est en Ontario, c’est une province anglophone et les francophones que je côtoie ne sont pas québécois.
En voyant mon interlocuteur me dévisager d’un air dubitatif et au bord de l’entorse du sourcil gauche, j’abandonne mon explication.

J’ai également entendu une bonne centaine de fois, me promettant intérieurement que je tordrais le coup à la prochaine personne :
Alors, pas trop dur le choc thermique ?
Au début on est patient, on explique les principes du climat continental, très froid l’hiver certes, mais très chaud l’été. Puis après, je pense vers la vingtième personne, on devient plus direct :
T’as séché les cours au collège toi ? Le climat continental tu connais pas ? Non parce que au moins, on n’a pas un temps pourri comme à Paris. Il fait bien plus beau et chaud l’été. A Toronto on a des plages.
Mais j’ai eu la vague impression que certains pensaient que je mentais et que j’avais dû mettre mes bottes et mon manteau de fourrure à la consigne de l’aéroport.

J’ai retrouvé mes amis également et je m’aperçois qu’ils ont découvert de nouveaux endroits de réunion après le travail, et je n’étais pas là.
Je me rends compte que j’ai quitté des gens en or, qui sont capables de tout laisser en stand-by parce que Mademoiselle Sophie prend ses 2 semaines de congés annuels dans la capitale.
Je réalise qu’on a raté presque un an de vie. J’essaie de rattraper les histoires, je cours après le temps, mais en vain. De toute façon je pars demain, sans eux, parce que je vois ma vie différemment, parce que je me suis payé le luxe d’un nouveau départ, pourquoi ? Parce que.
Dans l’avion du retour, je suis heureuse de quitter cette tension électrique qui est palpable jusque dans la moindre ruelle et au plus profond des gens. Cette tension perpétuelle qui semble grignoter les être de ce minuscule pays, petit à petit, comme un mauvais virus. Je crois que là-bas on appelle ça le stress.
Je me dis, qu’il faut que j’atterrisse en même temps que l’avion et que je cesse de me raconter des histoires.
Personne ne viendra au Canada pour y vivre, aucun de mes amis ou membre de ma famille ne fera le grand saut par-dessus l’océan et par conséquent, je dois consacrer plus d’énergie à rencontrer des gens ici.
Je ne veux, peux, remplacer ce que j’ai déjà, mais pour que ma vie soit complète, il va falloir que je laisse le fil tendu au dessus de l’Atlantique se désagréger un petit peu plus.

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