Mon Québec : bilan de 8 ans - Immigrer.com
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Mon Québec : bilan de 8 ans

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De Vista

Bonjour,

Après plus de 8 années d’une très grande densité passées au Québec et alors qu’un changement majeur arrive dans ma vie, je ressens le besoin de me retourner sur ces quelques années et d’en faire le bilan personnel. Je me suis dis que ça pourrait intéresser quelques personnes ici, ayant moi-même profité des expériences lues sur ce forum il y a 8 ans.

Voici le récit de mon expérience, de mon vécu, mes opinions et mes commentaires sur différents aspects de l’immigration. Comme tout texte de ce genre, il est très subjectif et n’a pas valeur de vérité universelle. Tirez-en les leçons que vous voudrez! Je vais raconter cela façon histoire, puis tirer quelques enseignements de mes expériences…

Pour commencer, je suis ce que j’appelle un immigrant de loisir. Rien ne me forçait à immigrer.
À 25 ans je me suis dis que c’était le moment ou jamais de prendre l’air ailleurs. Je n’avais jamais pensé au Québec dont je ne connaissais que les clichés habituels de cabanes en rondin et de bucherons, le tout agrémenté de chanteuses à voix dont les chansons me laissaient de marbre, mais au gré des rencontres et des amitiés, cette destination s’est imposée.

Mon projet d’immigration, je l’ai monté sur ce forum, et au début il était relativement clair : 5 ans. 5 ans pour découvrir autre chose et décider si je voulais rester ici ou rentrer en France. 5 ans pour apprendre à me connaître et à me débrouiller loin de la famille. 5 ans pour obtenir la citoyenneté avant de rentrer en France, ceci me permettant de revenir plus tard si je le souhaitais.

J’ai donc atterri à Montréal en mars 2004, attendu à l’aéroport par des membres du forum et logé dans un appartement trouvé par le forum. Il y a pire comme arrivée. Au début je l’ai eu facile, trop surement. J’avais des amis et des économies pour voir venir et j’avais rencontré une française via le forum qui devait me rejoindre en juin. J’ai donc cherché du boulot mais sans forcer et fait un peu de tourisme.

Je suis passé par toutes les démarches habituelles : paperasse, permis, se loger (un 3 ½ à Côte des Neiges), s’équiper, découvrir la ville, refaire le CV à la québécoise avec l’OMI et l’AMPE.

De mars à juin les économies se sont un peu envolées, et faute de job, j’ai commencé les traditionnelles jobines (emballeur dans un entrepôt de vêtement, manutentionnaire dans un entrepôt). Ça payait les factures, mais cercle vicieux, ça laissait moins de temps pour chercher un vrai boulot. S’en est suivi la non moins traditionnelle déprime des immigrants, et je me suis renfermé sur moi-même en me coupant de mes amis et connaissances.

En septembre 2004, l’envie nous a pris de quitter Montréal où l’on ne se sentait pas bien. On a pris contact avec l’une des dizaines d’agences d’aide aux immigrants qui peuplent Montréal qui nous a mis en contact avec une agence du même genre dans le Saguenay. 2 mois plus tard, après 3 allers-retours dans le Saguenay pour visiter et passer des entrevues, une proposition d’emploi en poche, on déménage. Un mois plus tard, atterrissage catastrophe à Québec chez des connaissances qui ont eu la gentillesse de nous héberger. Bilan de l’opération, un crash monumental, la perte de certaines illusions et surtout plus un rond sur le compte en banque. En arrivant au Saguenay, c’est simple : l’aide promise n’a jamais eu lieu, que ce soit pour l’emploi, le logement ou le déménagement. On avait pourtant fait affaire avec une association sérieuse ayant pignon sur rue et financé par des deniers publics avec en principe des comptes à rendre. Et mon offre de travail est tombée à l’eau sitôt arrivé.

Décembre 2004-septembre 2005 : on habite à Québec. Pendant 6 mois, deux petits boulots chacun, dont un de nuit pour moi (dans un couche-tard), 5h de sommeil par jour, aucun jour de congé. Mais les comptes remontent.
En septembre 2005, se rendant à l’évidence que mes diplômes ne sont pas reconnus par les employeurs (maîtrise de chimie et DESS industriel), je reprends une maitrise à l’Université Laval. Septembre 2005 toujours, après 3 jours de pluie à 50mm par jour, la rivière Lorette déborde, inondation, perte de beaucoup de nos affaires. On a été hébergé chez des connaissances pendant 2 mois avant de se retrouver un logement décent.

Les années suivantes sont plus du domaine de la vie quotidienne et de la découverte progressive du Québec. Il y a eu de tout, joie, peine. Il y a des choses que je veux garder pour moi alors voici juste les éléments marquant :

2006 décès d’un parent. Je ne m’étendrai pas, mais autant prévenir l’immigrant, c’est le genre d’évènement qui force à remettre en cause une immigration et qui se fait se poser bien des questions par rapport aux proches qui nous restent et à notre proximité avec la famille.

2007 après 2 ans d’étude doublées de petits boulots, emploi temporaire dans la fonction publique. Enfin un salaire décent qui permet de se promener dans la province.

2008 citoyenneté Canadienne obtenue, et cérémonie de citoyenneté lors des fêtes du 400ème. Un grand moment pour moi.

2009 permanence au gouvernement.

2010-2011 remise en question pour moi du retour en France qui était en discussion, séparation en partie liée à cela.

2011 en couple avec une québécoise

2012 achat de maison, bébé en approche.

Voici quelques moments d’un parcours d’immigrant. Comme pour beaucoup, il a été relativement non linéaire, et souvent lié aux rencontres que j’ai pu faire.

Pour compléter ce bilan, quelques réflexions dans le désordre sur certains éléments qui me viennent à l’esprit :

Choix du lieu de vie : J’ai atterri à Montréal comme beaucoup et je n’ai pas aimé y vivre. Par contre j’aime beaucoup y aller et j’aimerai sincèrement que la ville soit mieux gouvernée et sorte de son marasme. Le Québec a besoin de sa métropole en santé. On est ensuite arrivé à Québec un peu par hasard, mais aussi parce qu’on y connaissait du monde. Je suis littéralement en amour avec cette ville, et j’aurai bien du mal à vivre ailleurs. Conseil aux immigrants, baladez vous! Ne choisissez pas votre ville par défaut. Vous changez de pays merde, ce n’est pas pour vivre dans une place qui ne vous plait pas! Tous les coins du Québec ont leurs avantages et leurs inconvénients. À vous de juger!

Les agences d’aide aux immigrants : Mon expérience est désastreuse. Si ces agences m’on été d’une certaine aide au début, j’ai ai une très mauvaise image. De mon point de vu, ces agences sont là pour faire du cash et se contrefoutent pour la plupart de votre bien être. Chaque nom inscrit sur la liste de client amène une subvention gouvernementale et c’est la seule chose qui compte.

L’immigration française : immigration de luxe en générale, ou en tout cas de loisir. De mon expérience (mon histoire mais aussi celle d’immigrants que je connais), une majorité de français rétrograde de qualité de vie et ne retrouve ses marques qu’après quelques mois ou années. Il faut savoir ce que l’on veut et où l’on va. Savoir aussi ce qui est important dans la vie… le bonheur ou le statu social. Je ne regrette pas les 7 années qui m’ont conduit au bonheur que je vis aujourd’hui, mais dieu qu’elles ont parfois été dures et pénibles.

Le voyage préparatoire : indispensable. Et je sais de quoi je parle, je ne l’ai pas fait. Et je l’ai toujours regretté. J’aurai perdu beaucoup moins de temps et d’argent.

La paperasse d’immigration : les doigts dans le nez… si vous trouvez ça compliqué, revenez-en, c’est le bout le plus facile dans une immigration.

Le réseau social : compliqué, différent mais pas impossible. Il faut juste que vous compreniez que vous n’êtes pas en France…. Culture différente, relations différentes! Pour grossir le trait, en France les gens sont souvent difficiles d’approche, mais une fois entré dans le cercle social, l’amitié est inconditionnelle. Au Québec, les gens sont très ouverts en première approche, mais très protecteur de leur cercle intime.

Le racisme des québécois : bien plus rare qu’on le dit, en tout cas pour les français. J’ai droit à mon quota de blagues sur les maudits français, d’imitation d’accent pointu et autres joyeuseté. Pis vous n’avez pas le sens de l’humour? Pas capable d’une répartie humoristique douce? (attention douce, l’agressivité et la confrontation sont très mal perçu ici). En 8 ans j’ai eu une seule vraie réaction raciste à l’écoute de mon accent, et on tombait dans la catégorie « gros colon certifié depuis 1947 ».

Les médecins de famille : frustrant, compliqué, mais rien d’impossible… s’inscrire dans des cliniques sur liste d’attente, guetter l’ouverture de nouvelle clinique, en parler à ses amis et connaissances qui connaissent peut-être un médecin qui ouvre ses listes… Il m’a fallu attendre 2007 pour en trouver un, en même temps je ne cherchais pas avant ça. Et j’ai changé en 2009 quand le premier a mis la main sous la porte.

Les urgences : mon expérience personnelle (dense genre 15 visites pour moi ou mes proches en 8 ans) est plutôt positive. À Québec, sauf circonstance exceptionnelle (noël, épidémie de gastro…) si vous êtes vraiment une urgence, vous n’attendrez pas. Sinon, en moyenne c’est 5-6 h d’attente, puis encore 5-6h pour sortir de là.

Les cliniques sans-rendez-vous : J’en ai essayé 5-6 à Québec pour les petits bobos du quotidien. J’en ai dégoté une bonne ou l’attente est raisonnable (de 30mn à 3h max) avec des horaires d’ouverture étendus. Là encore, il existe bel et bien une médecine de première ligne qui peut-être efficace au Québec.

Les CLSC : je les évite comme la peste, et ne peux donc pas en parler.

La vrai honte dans le milieu médical : l’accès aux spécialistes, surtout pour les cancers… c’est lamentable.

L’administration : un plaisir… à comparer de la France.

Le sens du service : indubitablement un truc que les québécois ont et que les français n’ont pas… avec ses mauvais cotés aussi. Si on a toujours l’air de déranger dans un magasin français, on est souvent achalé par les vendeurs qui n’arrêtent pas de venir vous voir au Québec.

Les relations homme-femme : à date ça va très bien. Il faut dire que je ne suis pas machiste pantoute et que je suis ultra-égalitaire dans mes attitudes sans avoir perdu ma petite galanterie française. Redoutable. Plus généralement (au travail par exemple) j’apprécie le coté égalitaire et équilibré des relations. Mauvais pendant, le féminisme parfois excessif de certaines, en même temps les acquis sont si vite perdus…

Les voitures : le coffre à hayon m’a terriblement manqué au début (en 2004 très peu de modèle en avait). Aujourd’hui je roule en petite japonaise… à hayon.

La conduite automobile : Rock n’roll baby… le clignotant est en option chez la plupart des gens, la courtoisie une belle utopie partagée par une minorité de conducteur, et les jeunes me font terriblement peur. Ça roule en malade mentaux. Heureusement ils se calment vite.

La protection de la langue : les fadas de l’Office québécois de la langue française et du PQ sont des obsessifs compulsifs. Mais il suffit de mettre les pieds à Paris pour comprendre qu’ils ont raison. Le français doit être protégé de manière un peu excessive parfois au risque de laisser l’anglais s’immiscer partout dans le langage commercial, technique et courant même. Pourtant, les français ont généralement un meilleur niveau de français (sautez pas vos grand chevaux, c’est juste mon opinion, pas une vérité que je veux enfoncer dans la gorge de tout le monde), qu’il s’agisse d’orthographe, de grammaire, mais surtout de vocabulaire. Ce qui ne signifie pas que les québécois sont mauvais. Leur scolarité est juste d’avantage basée sur les aptitudes que sur l’académique pur comme en France. Par contre, il n’est pas loin à mon avis le jour où les québécois seront meilleurs que les français. Et ce sera grâce à la loi 101…

Les anglicismes : débat sans fin. Il y en a autant des deux cotés de la flaque. Sauf que du coté tricolore ça se développe à grands pas…

La position jamais québécois, mais plus tout à fait français : je le vis bien personnellement. Je me détache progressivement des choses françaises même si je continue à suivre l’actualité, par contre depuis 1-2 ans je me sens beaucoup plus impliqué dans les débats de société québécois. C’est un processus naturel je pense et qui dans mon cas a été freiné par le fait que j’ai vécu avec une française pendant 7 ans. Naturel, mais ça vous met progressivement en décalage avec vos amis et familles qui comprennent mal que vous ne vous passionnez pas pour les frasques de Sarko, et qui vous demande « c’est quoi cette révolution de carré rouge ».

La vie culturelle québécoise : très riche. Je ne compte plus les festivals, les fêtes, les activités en tout genre. Il y a beaucoup d’artistes talentueux. Il y a aussi beaucoup de musés intéressant et un patrimoine plus dense qu’on le soupçonne au premier abord. Le problème des immigrants français c’est de venir d’un pays au patrimoine ultra développé. Alors c’est sur qu’au Québec il n’y a pas le Louvre ou Versailles, pas de Joconde ou de château de la Loire. Mais si voir ce genre de chose plus souvent qu’a l’occasion de quelques vacances vous est essentiel, mauvais pays. Ici on a moins de stock, mais on le met en valeur, et les artistes québécois sont très imaginatifs.

La nature, les paysages : je kiffe. Je m’éclatte.

Ce qui me manque : la bouffe un peu, mais de moins en moins. Mes amis, ma ville et un peu de ma famille. Mes montagnes aussi.

Ce que j’aime : ma ville, Montréal en visite, la créativité, le fleuve, le Lac, la Gaspésie, le Nouveau-Brunswick, Les Chocolats Favoris, ma maison, ma blonde, le vieux Québec, la plage Jacques Cartier, l’Astral, Daniel Bélanger, Jean Leloup, Les Cowboys, Mes aïeux, les trois accords, les lacs et les rivières, la décontraction générale, les relations professionnelles moins guidées, et mille et une chose.

Ce qui m’inquiète : voir vieillir ma mère loin d’ici.

En conclusion, Ma vie est ici et je ne pense plus rentrer. J’ai trouvé un équilibre ici que je ne pense pas que j’aurai été capable d’atteindre en France. Je n’ai jamais regretté mon choix. Mon projet de 5 ans s’est transformé en projet d’une vie.

Chaque immigration, chaque histoire est différente. Mais si je devais donner un conseil, c’est de faire preuve de curiosité et de savoir s’adapter. On est des invités avant de faire parti des meubles. Invité ça veut pas dire paillasson, mais on doit un minimum se plier aux règles de la maison.

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