L’Association québécoise des avocats et avocates en droit de l’immigration (AQAADI) monte au créneau contre la stratégie du gouvernement Legault. Dans un mémoire présenté aux consultations publiques d’octobre sur la planification de l’immigration, l’organisme accuse Québec de « gonfler artificiellement » les statistiques concernant les permis de mobilité internationale (PMI) et de vouloir restreindre des catégories d’immigration qui relèvent pourtant de la compétence exclusive d’Ottawa.
Des chiffres jugés trompeurs
Selon l’AQAADI, le ministère de l’Immigration inclut dans ses bilans des milliers de titulaires de PMI, alors que leur gestion dépend du gouvernement fédéral. En présentant ces permis temporaires comme un fardeau sur ses services, Québec gonflerait volontairement ses statistiques afin de justifier des seuils plus bas d’admissions permanentes.
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Or, la majorité de ces personnes sont déjà bien intégrées : elles travaillent, participent à la vie économique et ont souvent obtenu un certificat de sélection du Québec, préalable indispensable pour demander la résidence permanente à Ottawa.
Les limites de l’Accord Canada-Québec
L’Association rappelle que l’Accord signé en 1991 donne au Québec le pouvoir de sélectionner ses immigrants économiques, mais pas celui d’imposer des plafonds en matière de réunification familiale, d’immigration humanitaire ou de réfugiés. Tenter de le faire serait, selon elle, une violation de l’Accord et pourrait mener à des contestations judiciaires.
Elle note également que le poids démographique du Québec au sein du Canada n’a cessé de reculer : de 25,2 % en 1991 à 21,7 % en 2025. Les seuils, insiste-t-elle, devraient viser à maintenir ce poids minimal, non à l’affaiblir.
Des délais qui s’allongent dangereusement
L’AQAADI s’inquiète de l’accumulation des demandes. Près de 142 000 personnes ayant déjà reçu un certificat de sélection du Québec attendent encore leur résidence permanente. Dans certains volets, les délais pourraient atteindre plusieurs décennies : jusqu’à 38 ans pour l’immigration humanitaire à partir de 2027, illustre l’Association.
L’avocat Me Maxime Lapointe, qui présentera son mémoire le 28 octobre, dénonce une gestion « en silo » et « improvisée ». Selon lui, il est urgent de traiter en priorité les dossiers en attente et de redonner prévisibilité et cohérence à la politique d’immigration.
Les recommandations des praticiens
Parmi les propositions mises de l’avant :
- Dépolitiser le processus et accélérer le traitement des demandes déjà approuvées par Québec.
- Rouvrir des programmes phares comme le PEQ (Programme de l’expérience québécoise) et rendre plus transparent le PSTQ (Programme de sélection des travailleurs qualifiés).
- Réviser l’Accord Canada-Québec, jugé désuet.
- Créer un commissaire à l’immigration, chargé de surveiller les flux migratoires, de lutter contre la fraude et d’améliorer la coordination avec Ottawa.
- Adapter le budget du MIFI à la baisse des seuils si ceux-ci sont adoptés, afin d’assurer une cohérence entre ressources et objectifs.
Un enjeu politique majeur
Le gouvernement caquiste envisage, pour la période 2026-2029, de plafonner les admissions permanentes annuelles entre 25 000 et 45 000, dont seulement 200 à 500 pour l’immigration humanitaire. Un choix qui, selon plusieurs intervenants, pourrait détériorer les relations avec le fédéral et nuire à l’attractivité du Québec à long terme.
« Il faut cesser les avances-reculs, offrir une planification rigoureuse et prévisible, et retenir les talents francophones », insiste Me Lapointe. Faute de quoi, le Québec risque non seulement des contestations judiciaires, mais aussi de miner sa crédibilité en matière d’immigration.
source : Radio-Canada
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