Alors que le gouvernement fédéral resserre progressivement ses politiques migratoires, un nouveau sondage révèle une tendance marquante : une majorité de nouveaux arrivants eux-mêmes souhaitent désormais que le Canada accueille moins d’immigrants chaque année.
Derrière ces chiffres se cachent des histoires humaines, parfois marquées par de longues séparations familiales et des parcours semés d’embûches, comme celle de Leila Nustrada et de sa mère comme rapporté par CityNews.
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Dix ans d’attente pour retrouver sa famille
Originaire des Philippines, la mère de Leila Nustrada a suivi ce qu’elle appelle son « petit rêve canadien ». Après avoir travaillé à Hong Kong, elle s’est installée dans la région du Grand Toronto en 2018. En tentant d’obtenir sa résidence permanente, elle apprend qu’elle n’est pas admissible. Pour améliorer ses chances, elle débourse alors plusieurs milliers de dollars afin d’obtenir un certificat de préposée aux bénéficiaires (Personal Support Worker).
La pandémie de COVID-19 vient toutefois bouleverser ses plans. Ce n’est qu’en 2022, grâce à un programme spécial offrant une voie vers la résidence permanente, qu’elle réussira finalement à faire venir sa famille des Philippines.
« C’est très spécial d’être de nouveau avec ma mère, même partager un repas de temps en temps, ce sont de petites choses, mais elles comptent énormément », confie Leila, qui avait 18 ans au moment de son arrivée au Canada.
Si elle se dit reconnaissante du dénouement heureux de sa famille, la jeune femme s’inquiète toutefois pour ceux qui tentent aujourd’hui d’immigrer, dans un contexte devenu plus restrictif.
Une majorité souhaite des seuils beaucoup plus bas
Au cours des deux dernières années, Ottawa a multiplié les mesures pour limiter le nombre de résidents temporaires et plafonner certains programmes. Le budget fédéral déposé récemment fixe la cible de nouveaux résidents permanents à 380 000 par an pour la période 2026-2028 et prévoit une réduction presque de moitié du nombre de résidents temporaires.
Ces cibles demeurent toutefois nettement supérieures à ce que souhaite la majorité des nouveaux arrivants, selon un sondage réalisé par la firme Léger pour OMNI News.
Menée en octobre auprès de 1 510 répondants tous nés à l’étranger, l’enquête révèle que 67 % des immigrants estiment que le Canada devrait accueillir moins de 300 000 nouveaux immigrants par année. Plus encore, quatre répondants sur dix jugent que ce chiffre devrait être inférieur à 100 000.

« Je trouve regrettable que la perception du public à l’égard de l’immigration ait changé aussi radicalement », souligne Andrew Enns, vice-président exécutif de Léger.
Selon lui, bien que de nombreux nouveaux arrivants appuient un resserrement pour réduire la pression sur le logement, les soins de santé et les services publics, les immigrants plus récents sont plus partagés. « Ils rappellent que, dans certains secteurs, les travailleurs étrangers temporaires demeurent indispensables, car ce sont souvent eux qui sont directement touchés par ces changements », explique-t-il.
« Nous avons été abandonnés par le système »
Le sondage indique que, pour l’instant, seulement un immigrant sur dix affirme avoir personnellement subi les effets des politiques plus strictes, ou qu’un membre de sa famille a été touché. Mais pour certains, l’impact est déjà lourd.
C’est le cas d’Abhijit Singh, arrivé au Canada comme étudiant international en 2019. Sa demande de résidence permanente dans le cadre du programme ontarien d’Entrée express pour les métiers spécialisés a été refusée après près de deux ans d’attente.
« Pendant la pandémie, le gouvernement invitait les étudiants internationaux à venir étudier et travailler. Personne ne disait alors qu’on prenait les emplois des Canadiens », raconte-t-il. Aujourd’hui, son permis de travail arrive à échéance, sans perspective claire : « Nous avons été abandonnés par le système. »
À Montréal, l’immigration est également devenue plus imprévisible pour de nombreux candidats, selon Alessandra Attias, consultante en immigration. « Quand on fait venir quelqu’un de l’Inde ou de la Tunisie pour étudier à Toronto ou à Vancouver, il y a une attente implicite de pouvoir rester. Or, ce n’est pas toujours le cas. Les gens se sentent trompés », dit-elle. Elle rappelle que le Canada a longtemps été très efficace pour se promouvoir comme une terre d’accueil, mais que les règles sont maintenant beaucoup plus mouvantes.
Le bilan du gouvernement Carney divise
Le sondage révèle aussi une division nette quant au bilan du gouvernement fédéral en matière d’immigration. Quatre immigrants sur dix estiment qu’il n’y a aucune différence entre les politiques du gouvernement dirigé par Mark Carney et celles de l’ancien premier ministre Justin Trudeau. La même proportion croit toutefois que la situation s’est améliorée.
Pour les répondants, les priorités du système d’immigration devraient être un meilleur équilibre entre les seuils d’admission, la capacité des infrastructures — notamment le logement — et les besoins de croissance économique.
Appel à plus d’empathie
Aujourd’hui étudiante dans sa troisième année d’université à Guelph, Leila Nustrada estime que les immigrants doivent être « plus réalistes quant à la façon dont la vie fonctionne maintenant au Canada ». Elle croit néanmoins que la solution passe aussi par davantage de compréhension entre citoyens et nouveaux arrivants.
« Nous devrions bâtir une communauté plus solidaire. Au fond, nous voulons tous simplement offrir une vie meilleure à nos familles », conclut-elle.
Le sondage a été réalisé entre le 2 et le 15 octobre 2025 à l’aide du panel en ligne de Léger. Aucune marge d’erreur ne peut lui être associée.
Source : City News



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