Trois des principales voies accélérées vers la résidence permanente au Québec s’apprêtent à disparaître, laissant dans l’incertitude des milliers de travailleurs et leurs familles. Dès le 1er janvier 2026, les programmes pilotes destinés aux travailleurs de la transformation alimentaire, aux préposés aux bénéficiaires ainsi qu’aux professionnels des secteurs de l’intelligence artificielle, des technologies de l’information et des effets visuels ne seront pas renouvelés. Leurs quotas ayant été atteints avant même la fin de décembre 2025, aucune nouvelle demande n’est désormais acceptée.
Mis en place en 2021 pour répondre à des pénuries de main-d’œuvre jugées prioritaires par Québec, ces programmes offraient une voie plus directe vers la résidence permanente. Les travailleurs occupant — ou ayant accepté — un emploi à temps plein dans l’un de ces secteurs pouvaient déposer une demande sans passer par les mécanismes réguliers, souvent plus longs et plus incertains.
🎓 Recevez infos exclusives + accès aux webinaires Q&R
Abonnez-vous pour recevoir chaque semaine :
- Les dernières nouvelles sur l’immigration au Canada
- Des invitations à nos webinaires (questions/réponses en direct)
- Des outils pratiques pour réussir votre projet d’installation
Pour Me Soraya Blouin, avocate spécialisée en immigration, l’enjeu ne réside pas dans le principe même d’un ajustement des politiques. « L’immigration est sujette à changement, les besoins évoluent et c’est normal que les programmes s’adaptent », reconnaît-elle. Ce qui la préoccupe profondément, en revanche, c’est la façon dont la fermeture a été annoncée. Selon elle, l’absence totale de période transitoire est difficilement justifiable lorsqu’il est question de projets de vie bien réels.
L’annonce de l’atteinte des quotas est survenue de façon soudaine, alors que de nombreuses demandes étaient en préparation. « On nous a appris tardivement que l’immigration ne recevait plus de dossiers, sans aucune solution de rechange. Des familles croyaient encore être admissibles et se retrouvent aujourd’hui sans option », déplore l’avocate. La fermeture définitive des programmes, dès le début de 2026, signifie que ces personnes ne pourront même pas retenter leur chance l’an prochain.
Pour Me Blouin, la situation est d’autant plus choquante que plusieurs travailleurs avaient orienté leur carrière précisément en fonction de ces programmes. « Se faire claquer la porte au nez alors qu’on remplissait les critères, parfois à une journée près, peut bouleverser complètement le parcours d’une famille », résume-t-elle. Les conséquences humaines de ces décisions sont, selon elle, immenses et difficiles à mesurer. « Ça bouleverse les gens d’une façon qui ne peut même pas être décrite en mots. »
Ironiquement, ces programmes pilotes avaient déjà été critiqués pour leur manque d’efficacité. En 2023, ils n’attiraient pas autant de candidats que prévu. Deux ans plus tard, la situation s’est complètement inversée : les cibles ont été atteintes bien avant l’échéance dans les trois catégories. Cette popularité croissante s’explique en partie par le temps. « Plus un programme existe longtemps, plus il est connu, et plus les gens construisent leur projet d’immigration autour de critères précis », observe Me Blouin.
À cela s’ajoute le gel des invitations dans le Programme de sélection des travailleurs qualifiés (PSTQ) entre septembre 2024 et l’été 2025. Pendant plusieurs mois, les programmes pilotes sont devenus l’une des seules avenues réalistes pour accéder à la résidence permanente au Québec, ce qui a accentué leur attrait… avant qu’ils ne disparaissent abruptement.
Source : Le Devoir



Leave a comment