La nouvelle planification de l’immigration 2026-2029 dévoilée par le gouvernement Legault continue de susciter un vif mécontentement. Bien qu’il ait retenu le scénario le plus élevé parmi ceux envisagés — soit 45 000 admissions permanentes par année — Québec peine à convaincre. Pour plusieurs élus, intervenants et acteurs économiques, cette cible risque surtout d’allonger dramatiquement les délais d’accès à la résidence permanente.
Selon Guillaume Cliche-Rivard, député de Québec solidaire, les calculs parlent d’eux-mêmes : avec les inventaires actuels et les plafonds annoncés, certaines catégories pourraient devoir patienter jusqu’à 36 ans avant d’obtenir la résidence permanente. Les réfugiés reconnus, déjà confrontés à un système lent, verraient leurs délais grimper à environ 12 ans, un résultat qu’il juge « insensé » et totalement déconnecté de la réalité humanitaire.
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Le Parti libéral partage cette inquiétude. Son député André A. Morin qualifie d’« inhumains » les délais anticipés, particulièrement pour la réunification familiale. Avec plus de 42 000 dossiers en attente et des admissions limitées à 10 000 par an, des familles pourraient être séparées au moins quatre ans. Selon lui, Québec évite certes « la catastrophe », mais demeure loin de proposer une politique cohérente ou humaine.
Du côté des organismes, le ton est tout aussi sévère. La Table de concertation des organismes au service des réfugiés et immigrants (TCRI) parle carrément d’une « tragédie » en soulignant les répercussions sociales de milliers de personnes laissées dans des statuts précaires pendant des années. Son directeur, Stephan Reichhold, prévient que ces délais nuiront à l’intégration, à la stabilité et à la santé mentale de ceux qui souhaitent s’établir durablement au Québec.
Seul le Parti québécois adopte une perspective différente : pour son député Alex Boissonneault, la cible devrait au contraire être abaissée à 35 000. Selon lui, l’immigration ne constitue pas un remède automatique à la pénurie de main-d’œuvre et risque même d’accentuer la pression sur les services dans plusieurs régions.
La disparition du PEQ fait grincer des dents
L’autre annonce qui fait réagir est l’abolition du Programme de l’expérience québécoise (PEQ), un parcours très apprécié des travailleurs et étudiants souhaitant s’installer au Québec. Malgré de nombreuses demandes pour rétablir son volet « diplômés », Québec a plutôt choisi de le remplacer par le Programme de sélection des travailleurs qualifiés (PSTQ), un système à pointage plus complexe et surtout moins prévisible.
Pour Guillaume Cliche-Rivard, personne n’avait demandé l’abolition du PEQ. Le libéral André A. Morin craint pour sa part que l’absence de prévisibilité décourage les candidats venus précisément pour ce programme, qui pourraient désormais repartir faute de perspectives claires. La majorité des intervenants consultés réclamait pourtant le maintien — ou le retour — du PEQ, particulièrement pour les étudiants étrangers diplômés au Québec.
Un seuil jugé insuffisant pour l’économie
Le milieu économique, lui, tire la sonnette d’alarme. Le Conseil du patronat du Québec (CPQ) se dit extrêmement déçu et parle d’une « très mauvaise nouvelle » pour l’avenir du Québec. Selon son vice-président Daye Diallo, limiter les admissions à 45 000 personnes revient à priver les entreprises d’un bassin de talents essentiel pour soutenir la croissance et maintenir leurs activités. Il craint des pertes de contrats, des postes non comblés et même des délocalisations.
M. Diallo rappelle que, selon la répartition démographique canadienne, le Québec pourrait accueillir au moins 80 000 résidents permanents par année s’il voulait suivre la part que représente sa population au sein du pays. Le fédéral prévoit en effet stabiliser ses admissions à 380 000 par an pour les trois prochaines années. Pour lui, Québec ne peut plus blâmer Ottawa alors que le potentiel d’accueil provincial demeure sous-utilisé.
Source : Le Devoir



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