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Rendez-vous avec des femmes debout

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Ces dernières semaines, j’ai eu à découvrir comme vous peut être des femmes peu ordinaires : Vous savez, ce genre de personnes qui font avancer les choses, qui changent un peu le monde ou leur monde…parfois sans même se rendre compte.

Le premier de mes rendez-vous avec ces femmes, c’est à avec Lynda Thalie chanteuse québécoise d’origine algérienne. Et vous avez raison, je n’aurais rien dit sur elle si elle était juste québécoise. Lynda Thalie est arrivée au Québec à l’âge de 14 ans. Elle chante depuis quelques années mais son premier spectacle en solo à Québec n’a eu lieu que le 18 février dernier, à la salle Crémazie du Grand Théâtre. J’y étais. Malgré le peu de promotion autour du spectacle, un public nombreux a répondu présent, ce soir-là. Il est venu écouter des rythmes algériens, orientaux, du Flamenco mais aussi du folklore québécois. En somme, une belle soirée où Lynda Thalie passait de l’Arabe au Français avec une facilité remarquable. À voir la symbiose qui s’est vite créée entre l’artiste et le public, on aurait juré que Lynda Thalie avait déjà fait ses preuves à Québec d’autant que le public était constitué en grande majorité de Québécois de souche … comme l’homme qui partage sa vie depuis quelques années. Lynda Thalie se risquera même à prendre de longues minutes pour parler du plus grand moment de déchirement de sa vie, son départ de son Algérie natale, il y a 16 ans : lorsqu’elle se fait la promesse de ne pas oublier la baie d’Alger, le sable, son école, des amis et sa grand-mère qu’elle ne reverra plus jamais. Signe que le public était sensible à sa nostalgie, des Youyou ont fusé des quatre coins de la salle. Aujourd’hui, Lynda Thalie se dit attachée à son pays d’origine et complètement épanouie dans son pays d’adoption, « Mon Québec chéri » dit-elle. Consciente de son privilège de vivre dans un pays qui garantit l’égalité des droits entre les hommes et les femmes, elle n’oublie pas qu’il y a encore beaucoup de contrées au monde, où « les femmes ne peuvent pas élever la voix ». Elle fait sien le combat pour l’égalité.

Mon second rendez-vous avec une femme ou plutôt avec des femmes et qui mérite d’être souligné a eu lieu lorsque j’ai regardé un intéressant documentaire nommé « Rupture » qui part de l’histoire de deux femmes arabes – une Syrienne et une Tunisienne toutes deux arrivées au Québec suite à un parrainage – pour mettre en cause des abus d’utilisation de certaines dispositions de la loi sur le parrainage. Il est notamment question de celle liée à des situations où une femme parrainée se fait imposer, par son garant de mari, un statut inférieur dans le couple alors qu’elle débarque dans un pays qui garantit l’égalité des droits. Que doivent faire ces femmes? Accepter leur sort du moins le temps d’obtenir le statut de citoyenne ou se révolter et à ce moment là elles risquent d’être expulsées vers leur pays d’origine? Sur fond de parcours individuels faits de souffrances et de ruptures, le documentaire lance le débat sur l’intégration de familles arabes, maghrébines ou musulmanes en Occident. Presque tous les intervenants étaient des…intervenantes. Il n’y avait que Azzedine, immigrant d’origine algérienne, à porter la voix masculine. Tout le monde s’accorde sur la nécessité du changement, la divergence est autour de la question de savoir si le changement doit se faire avec la rupture avec le pays d’origine, la famille, le conjoint ou s’il y a une possibilité que le changement se fasse en gardant des liens. En d’autres termes, la question est de savoir si la réponse est individuelle ou collective. Azzedine pense que face à une problématique collective, il doit y a voir une réponse collective. Cela sous-entend, selon lui, de laisser du temps au temps. Pourtant Azzedine est un progressiste, il raconte qu’en voyant sa fille grandir, il avait peur qu’elle ait une relation avec un Algérien qui puisse la bloquer mais avoue qu’à présent que sa fille «connait un Québécois », il se pose la question de savoir pourquoi les relations ne sont pas durables. Azzedine se montre aussi un peu indulgent vis-à-vis des hommes arabes qui ont de la difficulté à constater que les femmes arabes, une fois arrivées, au Québec prennent de plus en plus de responsabilités dans les choix et les décisions du couple et sont plus autonomes. Il est vrai que dans les sociétés traditionnelles, ou en conflit avec la modernité, comme c’est le cas du Maghreb, on a beau être féministe, progressiste, les rapports entre les hommes et les femmes sont inégaux. La femme peut bien partager la même vision des rapports Hommes/Femmes que son conjoint, rien n’y fait car la famille, les amis, la société toute entière sont là pour la ramener dans une situation d’infériorité. Conséquence, bien des hommes finissent par tomber dans un certain confort qu’ils n’ont certes pas cherché mais qui les avantage. Et quand on arrive dans une société comme le Québec, le réveil n’est pas toujours facile pour tout le monde. Fawzia Zouari, écrivaine tunisienne et auteure du célèbre Pour en finir avec Shahrazad croit qu’une civilisation avance quand elle bouscule ses mythes et appelle l’homme arabe à se libérer de sa peur…peur de l’autre et peur de soi.

Mon troisième rendez-vous a eu lieu en me procurant le livre « Ma vie à contre-coran » de la Québécoise d’origine algérienne et chypriote Djemila Benimiloud. Un livre témoignage sur l’intégrisme religieux mais aussi sur la vie d’une femme qui a été contrainte de quitter l’Algérie au début de la décennie rouge. Ce n’est pas un livre sur l’histoire de l’intégrisme en Algérie car il en manquerait des chapitres et Djemila Benmiloud n’a pas passé toute sa vie en Algérie. C’est un plaidoyer contre l’intégrisme islamiste tout court. L’auteure relate, outre son parcours personnel, des exactions, des crimes perpétrés notamment contre les femmes dans plusieurs régions au monde et ce au nom de la religion musulmane. Le mérite de Djamila Benimiloud, c’est d’alerter avec courage l’opinion publique en occident sur les dangers de ce « fascisme vert ». Elle se dresse aussi contre le multiculturalisme et je retiens à ce titre et en particulier une phrase poignante « Je sais d’où je viens… Mon identité n’est pas coagulée. Le monde ne me fait pas peur. La diversité non plus…..Ce que je redoute, par contre, ce sont les identités collectives préfabriquées qu’on instrumentalise pour dresser les uns contre les autres et les enfermer dans des prisons ethniques et communautaristes…Surtout, n’essayez pas de me clouer, de me visser et de m’attacher à une communauté ». Djemila coule des jours heureux avec son « Gilles » et en 2009 certains trouveraient encore cela anormal parce qu’elle porte un nom arabe et lui un nom occidental. Des femmes debout comme Djamila, Fawzia et Lynda sont nombreuses à nous venir des pays arabes et musulmans. Elles sont souvent anonymes. Fatiguées par trop de souffrances subies dans leur pays d’origine, elles arrivent au Québec avec l’ambition de rattraper le temps perdu. Confrontées à une réalité socioprofessionnelle souvent dure, elles n’ont pas toujours la possibilité d’étaler tout leur potentiel. Quant à la société d’accueil, fait-elle suffisamment de la place à ces hommes et ces femmes qui viennent de sociétés traditionnelles mais qui partagent les valeurs de la société d’accueil. Je pense que non.

Avant d’être expulsé et d’être livré à la vindicte populaire au Québec, l’imam intégriste El- Djaziri a été par contre et pendant longtemps un bon « Client » pour les médias Québécois. Un client que bon nombre de Québécois identifient au Musulman ordinaire. À d’autres rendez-vous.

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Écrit par
Rayan

C’est à l’âge de 42 ans que Rabah alias Rayan arrive au Québec en octobre 2006 en provenance d’Algérie. Il s’installe avec sa famille dans la ville de Québec puis par la suite à Laval, au nord de Montréal. Rayan travaille dans l’enseignement et écrit depuis 2008 sur le site immigrer.com.

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